Invasion russe en Géorgie : nous ne retenons rien de l’histoire

Il y a quasiment 4 ans jours pour jours, le 3 septembre 2004, 344 personnes (dont 186 enfants) mourraient dans une école de Beslan, en Ossétie du Nord (fédération de Russie). Quel était donc le crime commis par ces gens pour subir un tel sort ? Et bien tout simplement d’être citoyens russes.

Tout de suite, notre réflexe nous invite à pointer du doigt les méchants terroristes. Seulement, vous êtes-vous déjà posé la question de savoir comment des gens, à priori tout à fait normaux et seins d’esprit, pouvaient en arriver à devenir des criminels sanglants capables de décimer froidement, aveuglément, et en toute conscience des centaines de personnes (dont une majorité d’enfants) juste parce qu’elles sont emblématiques d’une nation particulière ?

Revenons au contexte. En 1994, un certain Boris Eltsine crée la surprise en donnant l’ordre à ses troupes d’envahir la Tchétchénie, pays qu’il trouve un peu trop agité à cause de ses mouvements indépendantistes. La ville de Grozny tombe très vite, mais ce qui ne devait être qu’une frappe éclair se transforma en un véritable bourbier. Les soldats russes prirent place sans trop faire de cas des civilités humanistes, et de leur coté, les tchétchènes organisent la résistance pour pourrir la vie des troupes occupantes. Imaginez ce qu’un jeune de 18 ans peut ressentir lorsqu’il voit ses soeurs violées, ses parents fusillés, quand il se retrouve dans un quartier confiné par les troupes d’un pays qu’il ne reconnaît pas comme le sien, qui coupent tout moyen de communication et d’approvisionnement, afin d’amener la population à mourir de faim. Et pourquoi cette population subit ce traitement ? Tout simplement parce qu’elle ne souhaite pas se reconnaître comme sujet d’une nation qu’elle voit comme envahisseur impérialiste.

Pour sortir de l’impasse, Eltsine laisse naître une « République tchétchène d’Itchkérie », à priori indépendante. Seulement, en septembre 1999, un dénommé Vladimir Poutine, alors Premier ministre russe, lance l’ordre d’envahir ce jeune état vu comme bien trop turbulent. De nouveau, la ville de Grozny tombe en janvier 2000. Pour ce même jeune qui a maintenant 24 ans, l’histoire semble se répéter. Les mêmes crimes et les mêmes tortures sont perpétrés à ses proches par les soldats d’une nation qu’il ne reconnaît toujours pas comme sienne.

Alors, il voit rouge. Alors, il devient autiste. Alors, pour venger ses frères, soeurs, parents, amis, il laisse parler sa violence, sa haine, sa soif de vengeance. Il n’aura qu’une envie : faire du mal à ce peuple qui a envahi ses terres plusieurs fois dans l’histoire, dont deux fois sous ses propres yeux en réalisant des actions stigmatisantes. Plus aucune conscience humaniste ne l’empêchera de prendre en otage des centaines d’innocents, dont plus de 200 enfants. De les traumatiser. De les laisser sans autorisation de se lever, de manger, de boire, ou même d’uriner… Et comme la diplomatie ne semble pas être la qualité première des russes, la fin, vous la connaissez, j’en redonne le bilan au début de ce billet.

Pourquoi un tel rappel me direz-vous ? Nous sommes en août 2008, et actuellement, les troupes russes viennent d’envahir la Géorgie. Le crime des Géorgiens ? Ne pas vouloir se soumettre au gouvernement russe, qu’ils voient comme une nation d’envahisseurs impérialistes. Ça ne vous rappelle rien ?…

Alors non. Je ne veux surtout pas défendre le terrorisme. Ni même les causes des indépendantistes (car je l’avoue, j’ai un peu résumé l’histoire en oubliant de préciser que ces indépendantistes tchétchènes sont soutenus par des intégristes religieux prônant des lois et des styles de vie qui m’exècrent et que je combats par ailleurs ; comme quoi, rien n’est simple…).

Non. Je voulais juste rappeler que cette violence n’apparaît jamais de façon spontanée. Il s’agit souvent d’une escalade dont l’origine vient de l’ignorance (souvent volontaire) de certaines personnes à respecter la volonté de liberté, d’intégrité, d’indépendance d’autres. Encore une fois, je vous invite à relire Etienne de la Boétie (promis, je vous résumerai ses pensées dans un billet spécifique, sinon, celui-ci sera trop long). Parce que certains sont avides de pouvoir et de richesses situées sur des terres qui ne sont pas les leurs, ils n’hésitent pas à asservir des hommes et des femmes, de façon subtile ou par la force. Et ça n’est pas une fois que cette cage est construite et consolidée par des siècles de techniques d’aliénation qu’il faut nous insurger, qu’il nous faut réagir. Tout d’abord parce que le niveau de négociation ou de violence nécessaire à la libération de ces hommes peut avoir atteint un seuil important. Mais aussi, parce que ces pauvres êtres asservis sont autant de proies faciles pour les idées extrémistes, elles aussi utilisées comme armes par d’autres requins, avides eux aussi de pouvoir et de richesses situées  sur des terres qui ne sont pas les leurs…

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