En France, j’ai entendu des gens militer pour des partis proches de celui qui a déporté et exécuté plus de 6 millions de personnes durant la seconde guerre. D’autres militent pour des partis proches de ceux qui ont créé les Goulag ou les camps des Khmers rouges. Et pourtant, à part des décisions de justice du genre « payer un franc symbolique pour un mauvais jeu de mot sur les fours crématoires », je n’ai jamais vu personne aller en prison pour ça.
Alors, j’ai très vite fait le raccourcis comme quoi nous vivions dans des états où enfin, la liberté d’expression, à défaut d’être vraie et réelle à 100%, était suffisamment inscrite dans les gènes de nos constitutions pour que personne n’aille en prison pour avoir indiqué publiquement ses idées. Coup de tonnerre dans le ciel bleu (c’est une image hein, ne cherchez pas le beau temps aujourd’hui, il flotte depuis des jours, c’en est déprimant) : voilà que la France, ce grand pays des droits de l’homme (enfin, c’est ce qu’on nous dit, mais à force, j’y crois de moins en moins) vient d’extrader vers l’Espagne Aurore Martin, qui risque la prison pour… avoir été encartée dans un parti politique (Batasuna) et avoir participé à des réunions publiques de ce parti. A-t-elle posé des bombes ? Non. Milité pour en poser ? Non plus. Ses idées : une volonté de créer un état basque indépendant et plutôt gauchiste.
Certes, je trouve les idées indépendantistes idiotes, et le fait d’inscrire un bord politique comme étant le seul possible dans une « constitution » très dangereux. Mais ces idées, je me dois de les combattre avec le verbe, à force d’explications et d’arguments. Jamais dans l’humanité une idée aura disparue en mettant les gens en prison. Pire, ils peuvent passer pour martyrs, et enrôler à leur cause (pour de mauvaises raisons) des citoyens au bon coeur.
Or voilà. Le parti Batasuna n’étant pas illégal en France, Aurore Martin n’aurait jamais été inquiétée de participer à des réunions publiques de notre coté de la frontière. Mais comme elle l’a fait en Espagne, un mandat d’arrêt européen pèse sur sa tête depuis 2010. Et étant repérée sur notre territoire (parait-il suite à un contrôle routier banal selon notre ministère de l’intérieur), la France a accédé à la demande d’extradition de l’Espagne. La jeune femme, actuellement incarcérée à Madrid, risque 12 ans de prison.
Et là, je ne comprends pas. Lorsqu’une française est condamnée au Mexique pour un crime dont les chefs d’accusation sont reconnus par notre justice ( « enlèvement, séquestration, délinquance organisée et possession d’armes à feu et de munitions à l’usage exclusif des forces armée » ), la France s’insurge et c’est l’incident diplomatique (la justice mexicaine n’étant pas neutre à nos yeux, ce que je veux bien croire). Mais par contre, ça ne pose aucun problème à cette même France d’envoyer Aurore Martin dans les geôles espagnoles, pour un chef d’accusation qui, cette fois-ci, n’est pas reconnu par notre propre justice ( « participation à des réunions publiques du parti politique Batasuna », parti illégal en Espagne, mais pas en France), afin d’être jugée par une justice qui a les radicaux basques dans le collimateur, et qui n’est par conséquent peut être pas plus neutre que ça non plus. Quelqu’un peut-il m’expliquer ?
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