Albert Jacquard : Petite philosophie à l’usage des non philosophes

Ça fait quelques temps que j’ai terminé ce bouquin qu’on m’a offert, et, étant pas mal occupé à l’époque, j’ai fini par oublier de vous en parler.

Avant tout, de quoi s’agit-il ? D’un bouquin de philo, comme le titre le laisserait entendre ? Pas vraiment. Pas plus qu’un essai, qu’un roman, ou tout autre livre de structure classique. En réalité, Albert Jacquard est un scientifique spécialisé dans la génétique, qui a beaucoup oeuvré pour la vulgarisation des sciences (et de sa discipline en particulier), et qui a pas mal cogité sur l’éthique des avancées scientifiques.

Aussi, il a été invité par la prof de philo Huguette Planès, afin de dialoguer avec des lycéens de terminale. Ce livre résulte de ce dialogue, et se présente comme un ABCdaire. Un mot par lettre de l’alphabet, un chapitre pour traiter ce mot (A comme Autrui, B comme Biologie, C comme Conscience…). Ainsi, on voyage avec chaque mot dans les réflexions d’Albert Jacquard.

Ce genre de livre s’apparente à une auberge espagnole : chacun y trouvera ce qu’il veut. Où bien on est d’accord avec le scientifique-philosophe (et alors, on se sent conforté dans ses pensées, on se sent moins seul), ou bien (rarement en ce qui me concerne), on se dit qu’on aurait disserté autrement. Mais une chose est sûre : c’est une invitation à la réflexion, à l’introspection qui est un sport trop souvent ignoré.

Un seul petit reproche à ce livre : les réponses de Jacquard sont « cadrées » par la prof de philo, qui reste trop scolaire à mon goût. Dès que Jacquard s’écarte du « programme officiel » de terminale dicté par nos « normalisateurs de cerveaux », hop, on a le droit à un « et donc, comme disait Descartes… », ou un « pardonnez-moi de jouer les profs de philo — elle en est consciente en plus —, mais Kant disait… ». Aller, on oublie vite ce défaut, et on se laisse bercer par le fil de pensées du brillant scientifique, avec qui on se prend à rêver d’une ‘tite discussion au coin d’un bar autour d’une bonne mousse…

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Commentaire

Albert Jacquard : Petite philosophie à l’usage des non philosophes — 2 commentaires

  1. Un livre que j’ai eu plaisir à lire, mon premier livre de Jacquart, un cadeau qu’on m’a offert à moi aussi. Avec le temps j’avais oublié l’intervention de la prof de philo, ne me restait que les mots de Jacquart. Ainsi lorqu’il réécrit la fin de la Génèse :
    « lorsque l’homme au jardin d’Eden a osé désobéir à Dieu, celui-ci, pour la première fois, a souri. »

    je préfère, et de loin, cette fin là. Une jolie leçon de tolérance.

  2. @Firenze: en réalité, j’ai une immense méfiance vis à vis de la tolérance. Je ne crois pas que ce soit une solution à tout, bien au contraire. La tolérance intègre une notion assez négative, assez répulsive. Je « tolère » que le chien du voisin pisse sur ma roue de voiture (ou fasse autre chose devant mon trottoir)… c’est bien parce que je ne suis pas à coté pour lui donner un coup de pied dans le derrière. Je « tolère » que mon voisin écoute sa musique trop forte… c’est bien parce que ça n’est pas tous les jours, et qu’il n’est pas passé 22h pour que j’appelle les flics. Bref, la « tolérance », c’est surtout la faculté de prendre sur soit. Et je ne pense pas que ça soit un puis sans fond. Elle a ses limites…

    Pour gérer nos différences, il n’y a pas 36 solutions :
    – la tolérance en effet, mais je n’y crois pas trop à long terme ;
    – combattre ces différences… quelle horreur !!! Harmoniser tout le monde pour que tout le monde soit pareil, beurk !!!
    – l’ignorance. Pourquoi pas parfois. C’est peut-être moins pire que d’autres solutions ;
    – ou enfin, la compréhension. L’intégration. La mixité. Si je faisais la fête avec mon voisin, je trouverais certainement la musique moins forte. Si j’avais moi même un chien, ou si j’allais me balader avec mon voisin quand il promène le sien, les solutions à ses déjections seraient certainement trouvées….

    Quant à la notion de dieu… j’ai du mal à l’intégrer. Je n’arrive pas à imaginer une conscience qui serait au dessus de nous, et qui nous observerait (voire même qui interagirait avec nous). Qui nous dit que dans les objets de notre quotidien, à des échelles d’espace bien plus petites, à des échelles de temps infinitésimales, il n’existe pas des micro-microscopiques univers tout petits, avec plein de choses géniales qui se passent… et bien nous existons, et nous n’en avons pas conscience. Inversement, nous sommes peut-être des tous petits être, sur des microscopiques planètes, noyés au milieu d’un monde de géants, qui n’imaginent même pas que nous existons. Alors, si ces géants sont nos dieu… ou si nous sommes les dieux de ces microscopiques univers…

    Par contre, si je regarde la symbolique de la phrase de Jacquard, je vois que dieu sourit à notre désobéissance. Une invitation à la politique du rebelle ? Je préfère cette vision des choses… 😉

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