« Pourquoi j’ai mangé mon père » – Roy LEWIS

Terrrrrrible. Il y a des livres qui sont indispensables à lire. Celui-ci en est un. Pas qu’il contienne des idées neuves, mais il a une façon très originale de les présenter.

mangepere.pngJe m’explique. Le pitch en deux mots : l’histoire se déroule dans le pléistocène (je suis allé chercher de quoi vous faire un petit rappel : << pléistocène : période géologique qui s’étend d’il y a 1,8 million d’années à il y a 10’000 ans. Cette période est caractérisée par des cycles répétés de glaciations globales intensives, ou ères glaciaires, séparées par des stades interglaciaires plus chauds. >> ). Bref, vous l’aurez compris tout seul : nos héros ne sont pas des homo-sapiens-sapiens (hommes modernes), mais de respectables pithécanthropes. On y voit l’histoire (qui s’étale sur près d’une génération) d’une horde de ces pré-hommes. Leurs difficultés, leurs solutions, leurs erreurs…

Je dois vous l’avouer : j’avais un peu peur avant d’attaquer la lecture de cet ouvrage. L’auteur confirme qu’à cette époque, il y a moult tribus qui n’avaient à leur disposition que 200 ou 300 mots pour s’exprimer. Alors, dans un livre qui donne dans le paléontologique, je craignais que le style soit aussi limité que ce maigre vocabulaire (à la façon du film " la guerre du feu " de Jean-Jacques ANNAUD, qui a un scénario sans le moindre dialogue oral).

Mais ici : que nenni ! Au contraire… On y trouve des dialogues, des effets de style, et des idées tout ce qu’il y a de contemporain ! Ce décalage entraîne des situations très comiques.

Et c’est la première surprise de ce livre : il est extrêmement drôle. Passé les premières pages, une fois que nous acceptons cet anachronisme, on rit beaucoup. Par le texte au premier degré. Mais aussi, parce que l’auteur, au travers de paraboles, nous renvoie en pleine figure toutes formes de travers, d’interrogations, de pensées toutes à fait modernes, et même, étrangement, d’actualité.

J’ai dis étrangement ? En effet… Bien que traduit en français qu’en 1990, sachez que l’auteur a écrit cet ouvrage en 1960 ! Et pourtant, au travers des découvertes de nos ancêtres (découverte et maîtrise du feu, de l’art pictural, de la construction des armes, de la stratégie, de la diplomatie, de l’amour, de la croyance en l’au-delà), on y trouve des interrogations sur " faut-il breveter une idée comme la création du feu avec des silex" (quand on pense au battage actuel sur les brevets logiciels, on ne peut que sourire), sur " faut-il aller de l’avant, expérimenter, rechercher, ou bien faut-il se contenter de ce qu’on a ?"…

Et pour faire naître ces dilemmes, l’auteur a su distribuer habilement à ces personnages les différents caractères et modes de pensées politiques. On y trouve Edouard (le père), un génial inventeur très humaniste et progressiste, Vania (l’oncle), un vrai conservateur réactionnaire (pléonasme ?), Ian, le globe trotteur, l’aventurier qui revient dans sa tribu pour raconter ce qu’il a découvert dans le reste du monde…

Bref, très bon livre ! (CQFD)


Commentaire

« Pourquoi j’ai mangé mon père » – Roy LEWIS — 4 commentaires

  1. j’ai lu ce livre au collège en 4éme, il ma déçu, il est trop irréaliste!!Pourquoi changer de cadre spatiotemporaire pour se poser toujours les mêmes questions?

  2. Bon bah …. je vois que tu as lu ce livre toi aussi !!
    je l’ai beaucoup, beaucoup aimé, j’y ai appris des choses tout en riant. Je l’offre souvent aux gens que j’aime parce que je trouve que c’est un livre qu’il vaut mieux avoir lu. C’était un des livres préférés de Théodore Monod aussi, c’est à travers une interview de lui que je l’ai découvert.
    Un joli choix de lecture à proposer, effectivement ….

  3. @Firenze : je suis bien d’accord… Il est une parfaite synthèse « mine de rien » (étant donné l’anachronisme) de nos courants de pensée, de nos perversions, de nos modes de vies, de nos grandeurs… Oui, à lire absolument si on veux regarder l’espèce humaine vue d’en haut.

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