Salops de malades…

Ma big big chief, Roselyne Bachelot, vient d’avoir une idée génialissime pour combler le déficit de la sécu (à moins qu’elle ne lui ait été soufflée par Frédéric Van Roekeghem, le grand patron de l’assurance maladie) : il suffit de ne plus rembourser les médicaments aux gens malades. C’est simple, il suffisait d’y penser !

Enfin bon, en l’occurrence, ils ne s’attaquent pas à tous les malades hein. Non, juste ceux qui le sont le plus. Ceux qui sont dit "en longue maladie", et qui bénéficiaient jusqu’alors d’une prise en charge avec des taux de remboursement à 100%. Si ce projet passe, les médicalement à vignette bleue (dits "à service médical rendu modéré ou faible") ne seront plus remboursés qu’à 35%.

C’est connu, ces gens vraiment malades, et qui le restent longtemps avant de mourir, c’est indécent et immoral comme ils coûtent cher, comme ils creusent le déficit de la sécu avec leurs médocs (sic). Je les soupçonne même d’être malade exprès pour profiter du système.

Moi, je propose tout simplement de pousser le concept à l’extrême : arrêtons de rembourser tous les médicaments. Bon, l’assurance maladie ne servirait plus à grand chose, mais au moins ne serait-elle plus déficitaire…

Tu auras tout de même noté, cher lecteur, que ce projet ne touche qu’au remboursement des médicaments. Évidemment, hors de question de toucher aux tarifs des consultations de nos chers médecins (hey, c’est qu’ils ont des dépenses eux, comme les traites de leur 4×4 à rembourser ou le renouvellement de leur licence au golf). Peut-être peut-on rapprocher aussi ce choix par le fait que la communauté médicale est proportionnellement sur-représentée dans les instances politiques par rapport aux autres professions ? Va savoir…

En tout cas, c’est une idée bien plus efficace que la récupération de la franchise de 1 € pour les consultations réalisées dans les hôpitaux depuis 3 ans. Ah bon, tu n’es pas au courant, cher lecteur ? Il faut que je t’explique alors… La loi n° 2004-810 du 13 août 2004 relative à l’assurance maladie autorise celle-ci à vous prélever une franchise de 1 euro sur vos consultations. Or, si son application a été assez rapide chez les médecins libéraux, elle a été assez compliquée dans les hôpitaux publics (les causes sont nombreuses : informatique mal adaptée dans les hôpitaux et dans les caisses, besoin d’amélioration de la qualité de saisie des actes et des disciplines médicales, etc.). Nous sommes en 2008, et voilà seulement que les hôpitaux publics commencent à être en mesure de télétransmettre les informations permettant le prélèvement de cette manne, et que les caisses savent prendre en compte cette information.

Or, une idée sauvagement intelligente, comme il ne peut en apparaître que dans la tête d’un énarque a été mise en application : maintenant que les hôpitaux publics sont capables de coder les forfaits 1 €, pourquoi ne pas facturer rétroactivement ces forfaits aux assurés sociaux pour toutes les consultations réalisées depuis 3 ans (2005, 2006, et 2007) ? Pour une région comme la Lorraine, on annonce pas moins de 200 millions d’économie ! Sauf que l’énarque en question a oublié un "détail" : si, depuis le 1er janvier 2008, les systèmes d’information des hôpitaux sont à peu prêt capables de coder l’information, ça n’était pas le cas avant. Et reprendre les fichiers de 2005 à 2007 représente un travail titanesque. Rien qu’à voir les salaires des nombreuses personnes qui planchent sur ce problème lors des nombreuses réunions qui ont lieu sur ce sujet, moi je dis que dépenser 500 millions d’euros en ressources humaines et en logiciels pour n’en récupérer que 200 n’est peu être pas une opération rentable.

Le tout sans compter la joie que tu auras, cher lecteur, quand tu verras une retenue sur ta prochaine feuille de remboursement de soins de tous ces "forfaits 1 €" pour lesquels tu croyais avoir échappé. Sans compter les erreurs, la gestion des réclamations, des dossiers de contentieux…

Et oui, il n’est pas bouché le trou de la sécu, moi j’vous l’dis, il n’est pas bouché…

Remarque : désolé Pénélope d’avoir détourné ton strip pour cette cause.

Fond
musical :

 

 

Murray HeadOne night in Bangkok


Commentaire

Salops de malades… — 7 commentaires

  1. Bonjour:)

    Je suis médecin, et je travaille régulièrement avec le ministère. Je suis plutôt d’accord avec le fond de l’article, argumenté. Sauf quand on arrive à la partie qui rejette la faute sur les médecins. Là ça m’a fait de la peine pour vous car si vous travaillez réellement avec nous, vous ne pouvez pas ne pas savoir que nous sommes les premiers et les plus ardents défenseurs du système solidaire.
    Si nous souhaitions réellement améliorer nos honoraires pour payer les traites de nos 4×4 (que nous ne sommes pas en mesure de nous offrir avec nos rémunérations françaises 3 à 6 fois inférieures par rapport à celles de nos confrères de n’importe quel pays frontalier, et justifiées je vous le rapelle par les horaires (75 heures/sem en moyenne, le niveau de stress, et la formation (bac+11)), il nous suffirait de nous déconventionner. Il y a un moment où il faut commencer à réfléchir.
    Sinon le reste de l’analyse est intéressant.

    Bien à vous, en espérant que vous publierez ce commentaire.


    Posté anonymement par avalosh
    • Ah non, en dehors des spams ou commentaires ne respectant pas la loi, pas de raison que je censure…

      Loin de moi l’idée de fustiger une profession, qui plus est celle qui nous soigne, et qui a tout mon respect. Il est vrai qu’étant donné que je travaille dans un établissement public universitaire, je vois des médecins qui se dévouent à leur travail comme seuls certains moines savent le faire. D’autres font juste leur travail, et enfin, certains sont limite improductifs. Mais évidement, ça n’est pas pire ni mieux que dans les autres professions.

      Non, en fait, ma remarque se justifie assez facilement :
      1) vous êtes bien d’accord que jamais les tarifs des prestations ont baissé (et ceci dit, tant mieux),
      2) j’aimerais réellement faire le bilan du « parcours de soin ». A voir le nombre de consultations réalisées par les médecins généralistes pour simplement adresser un patient à leur confrère spécialiste, comparé au réel nombre de consultations abusives auprès de spécialistes qui ont pu ainsi être économisées,
      3) enfin, comme c’est le cas pour les enseignants, et de façon générale pour les fonctionnaires, vous ne pouvez nier que les médecins sont proportionnellement sur-représentés dans les différentes instances politiques.

      Mais relisez bien mon article : si je souligne ces points, je ne m’en offusque pas, et je ne demande pas que ça change. Je pense juste que ça n’est pas en gagnant quelques euros sur une boîte de médicament que nous réglerons le problème du déficit régulier de la sécu. Le problème est plus systémique, et les pistes à creuser sont plus à chercher du coté :
      – de l’efficience de la gestion de certains établissements,
      – et surtout, je m’interroge sur le bénéfice/prix de certaines technologies. Par exemple, sous prétexte qu’un bassin de santé a besoin de N IRM par an, il est fréquent qu’un CH finisse par mettre en place un IRM… dont les capacités sont plutôt de 10 x N. Or, in fine, l’IRM fonctionnera bien à ce rythme de croisière. C’est ce que j’appelle « la fonction crée le besoin ». Alors, est-ce que globalement, les patients seront mieux soignés grâce à ces 9 x N IRM qui n’étaient pas indispensables ?

      Bref, il y a beaucoup à dire sur le système de santé. Aussi, merci pour votre remarque.

  2. le plus dégueullasse dans l’histoire est que seuls qui ont une mutuelle pourront continuer à se soignier ie ceux qui ont encore un taf et les friqués. Si non faudra bien mourir pour laisser place nette !


    Posté anonymement par virginie (site web)
    • Si on pousse le vice à l’extrême, pourquoi ne pas euthanasier les malades longues durées ?!!! De tte façon ya peu de chance qu’ils s’en sortent!!!!
      A part cette remarque ignoble, il est clair que nous avançons vers un système de santé type américain où seuls les plus riches pourront se soigner et où les autres seront ruiner.


      Posté anonymement par a
      • De toute façon, de la part d’un gouvernement libéral (on a même dit hyper-libéral décomplexé), il n’y avait pas grand chose d’autre à attendre…

        Maintenant, ta première phrase n’est pas si idiote que ça (enfin, pas à prendre au premier degré évidemment). Je pense qu’une petite révision des textes sur l’euthanasie serait une bonne chose. Quand on voit que ceux qui veulent abréger leurs souffrances doivent aller en Suisse ou en Belgique… mais bon, je deviens hors sujet là.

        • Non, ce n’est pas hors sujet du tout

          nous revenons vers le coté sombre du christianisme : souffrir pour aller au paradie

          pas de médocs pour se soulager
          pas le droit d’abréger ses souffrances sans mettre en cause son entourage

          Alors quoi?

          oui, nous sommes nés d’une part pour tafer et d’autre par pour en chier

          Arrêter de faire des gosses , pitié pour eux !


          Posté anonymement par virginie (site web)
          • Non, quand je disais que j’étais hors-sujet, c’est par rapport au thème de l’article. Mais pas qu’il n’y ait rien à dire en plus. Et justement, ça sera plutôt l’occasion d’un autre billet, spécifique…

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